Les causes de la permanence de la crise politique en Haïti
Conseil pour les Affaires hémisphériques
En Ignorant Les Souffrances De L’île, La Politique Frivole Des États-Unis
D’Amérique Vis-à-vis D’Haïti Favorise L’imminence D’une Catastrophe
· Haïti continue de sombrer encore plus profondément dans la pauvreté, ainsi
que l’illustrent les crises accélérées que connaît la nation en matière d’eau
potable et de soins de santé. L’activité récente à Washington indique un
regain d’intérêt chez les députés démocrates et les agences d’aide
internationale pour faire face à cette situation.
· H.C.R. 382, Nouveau Partenariat pour Haïti, une résolution parrainée par le
Groupe des Parlementaires noirs américains, demande la fin du gel de
l’assistance économique et des politiques actuelles des États-Unis d’Amérique,
enracinées dans la négativité.
· 500 millions de dollars de prêts et d’assistance à Haïti ont été gelés par
les institutions financières internationales du fait de la polarisation
politique découlant de la politique menée par Washington vis-à-vis d’Haïti.
Ainsi, des centaines de millions de dollars se trouvent en danger
d’inutilisation. L’aile internationale du Parti Républicain, (IRI) et la
Maison Blanche de Georges Bush semblent orchestrer une conspiration contre la
nation la plus appauvrie de l’hémisphère.
· L’OEA débute un autre round de négociations entre le Gouvernement haïtien et
la vague coalition Convergence, constituée de membres de l’opposition, appuyés
par l’IRI, dont le seul pouvoir réside dans leur politique systématique de ne
pas négocier et l’influence qu’ils exercent par procuration sur les
détracteurs d’Aristide à Washington.
· Les États-Unis d’Amérique insistent sur le respect de normes électorales et
démocratiques exigeantes en Haïti, une nation qui est évidemment incapable de
satisfaire à de telles exigences pour le moment, en comparaison de ce qui est
demandé à d’autres nations bien moins démocratiques, mais recevant un
traitement favorisé, comme l’Arabie Saoudite par exemple.
· Tandis que le secrétaire américain au Trésor, Paul O'Neill, et le no. 2 de
l’Administration voyagent à l’autre bout de la terre pour s’enquérir de
l’opportunité de financer les nations frappées par la pauvreté, méritant de
l’assistance des États-Unis d’Amérique, l’Administration Bush continue de
négliger la pauvreté abjecte en Haïti, qui se trouve juste dans sa cour
arrière.
· Les problèmes de santé aigus prévalant actuellement en Haïti provoqueront de
manière inévitable un exode massif des habitants de l’île, comparable à celui
des années 1990, quand des milliers d’Haïtiens en route pour la Floride ont
été salués par une politique d’interdiction et de rapatriement immédiat. À
l’opposé des arrangements d’immigration reflétant le pouvoir de l’influente
communauté cubano-américaine de Miami, il n’existe pas de quota annuel de 20
000 immigrants pour Haïti.
Tandis que le monde regarde ailleurs, Haïti se trouve engagée dans une
véritable course contre la montre. Tandis que tous les aspects de ce qui
constitue le fondement de son existence, disparaissent du fait que son garde-manger
est vide, Washington continue sa politique de refus, prétendument conçue pour
induire des réformes au sein de l’Administration d’Aristide, mais dont
l’objectif réel est de discréditer sa personnalité politique ainsi que celle
du Parti Fanmi Lavalas au pouvoir. Les acteurs clé de cette conspiration sont
l’assistant secrétaire d’État, Otto Reich, l’Institut républicain
international, le sénateur Jesse Helms, les agents américains au sein de l’OEA
ainsi que l’opération de blanchiment de fonds de la politique étrangère de
coulisse de la Maison Blanche, par le très controversé National Endowment for
Democracy.
Comme dans le cas de Cuba, la Maison Blanche se sert d’un texte élaboré par
l’Administration Clinton qui, malheureusement voit le Président Aristide, non
comme l’atout politique le plus précieux d’Haïti, mais comme un dangereux
paria gauchiste qu’il faut maîtriser, en lui faisant affronter une opposition
punitive là où il n’en existe, en réalité, aucune. Tandis qu’ils jouent à un
jeu politique macabre, les membres de l’opposition accusent les sympathisants
d’Aristide de ne pas respecter la Constitution du pays.
La Crise De L’eau Marque Un Nouveau Tournant Critique Dans La Chute Libre
D’Haïti
Au cours du mois de mai, les Haïtiens ont atteint un nouveau point critique
dans leur chute libre vers la famine et la misère. Outre les malheurs
politiques et économiques séculaires du pays, ses habitants luttent maintenant
pour la survie sur une île où l’arabilité du sol peut être comparée à celle de
la lune, vu qu’une rareté sévère de l’eau provoque une ruée sur l’offre
dangereusement limitée du précieux liquide. Dans l’intervalle, une autre
affliction « jobienne » s’est abattue sur l’île, à la suite des récentes
inondations violentes qui ont fait 20 morts au moins. L’habitat naturel
d’Haïti est en train de se transformer en un amas de terrain désolé et érodé,
pouvant devenir complètement infertile à terme, livrant ses habitants en
pâture à une destitution irréversible. Ainsi que le confirme le rapport de
l’Organisation panaméricaine de la Santé : “ il n’existe pas une seule ville
possédant un système public d’évacuation des eaux usées et seulement des
unités isolées de traitement des eaux usées opèrent à travers le pays. La
gestion des résidus solides constitue un problème grave ; les mauvaises
pratiques de retraite des excréments ont pollué la quasi-totalité des 18
sources d’eau de Port-au-Prince. La principale cause de mortalité en Haïti
réside dans les maladies propagées à travers les eaux contaminées.
La panique de l’eau est venue aggraver une situation déjà difficile, forçant
des résidents à dépenser, en moyenne, près du dixième de leurs maigres revenus
d’un dollar par jour, pour l’acquisition de produits de base comme l’eau. À
cause de son prix inflationniste, moins de la moitié de la population
haïtienne consomme de l’eau potable. Entre-temps, en raison du pouvoir de veto
du département américain du Trésor sur son Conseil d’administration, la Banque
interaméricaine de Développement (BID), refuse de décaisser un prêt à faible
taux d’intérêt de 54 millions de dollars américains, destiné à améliorer
l’accès à l’eau potable, malgré l’interdiction spécifique, en vertu de sa
charte, de se mêler des questions d’ordre politique.
"H.C.R. 382 “Nouveau Partenariat Pour Haïti’’
Du 22-24 mai, des activistes ont protesté à Washington par des manifestations
devant le siège du Parlement (Capitol Hill) contre les sanctions imposées à
Haïti. À cette occasion, les critiques de la politique actuelle de
l’Administration Bush ont appelé à l’adoption de la Résolution 382 de la
Chambre, intitulée: "Un Nouveau Partenariat pour Haïti," présentée par la
représentante Barbara Lee (D-CA) à la Chambre le 18 avril au nom du Groupe des
Parlementaires noirs américains (The Congressional Black Caucus (CBC), dont
les membres plaident traditionnellement pour un traitement équitable en faveur
d’Haïti. Cette Résolution propose une cessation du blocage orchestré par les
États-Unis d’Amérique du Nord sur les engagements d’aide existants vers l’île
caraïbéenne.
L’organisme régional caraïbéen, CARICOM, aussi bien que de multiples
organisations de droits humains et de santé, ont déjà adopté des résolutions
similaires demandant la fourniture immédiate de l’assistance nécessaire à
cette nation en difficulté. Seuls le Congrès américain et la Maison Blanche
constituent encore des obstacles à la levée de l’embargo virtuel sur
l’assistance humanitaire à la population languissante.
Malheureusement, considérant le fait que la résolution reste bloquée au niveau
des comités et la division marquée du Congrès selon les critères de partis
politiques, il est peu probable qu’elle atteindra jamais l’Assemblée, à moins
qu’une action urgente soit entreprise par le public. Les statistiques
mentionnées dans cette résolution pendante, aident à illustrer les détresses
désespérées de la société haïtienne d’aujourd’hui. En avril dernier, seulement
40% de la population haïtienne avaient accès à l’eau potable. En raison
d’installations insuffisantes et de l’érosion extrême, même les pluies de
forte intensité n’ont pu augmenter l’offre d’eau potable, causant uniquement
des inondations dévastatrices. Entre-temps, lorsque les Haïtiens tombent
inévitablement malades, par suite de la consommation d’une eau contaminée,
seulement un individu sur 10 000 a accès à un médecin.
Finalement, comme si la nation ne vivait pas déjà dans la pire détresse, le
VIH et l’infection du sida croissent dans des proportions épidémiques,
provoquant la contamination de plus de 300 000 personnes. Selon une source
digne de foi, les morts découlant de ces infections ont conduit à l’existence
d’une population de plus de 163 000 orphelins.
Un Tissu De Mort : Pauvreté, Soins De Santé Et VIH En Haïti
Dr. Paul Farmer, professeur de médecine à Harvard medical, et directeur
remarquable de la Clinique Zanmi Lasante d’Haïti (Haiti's Zanmi Lasante
clinic), note le lien étroit entre la pauvreté et la propagation cataclysmique
de l’épidémie du VIH. La suspension de l’aide Internationale, observe le Dr.
Farmer, coïncide avec un accroissement exponentiel du nombre de patients non
traités en Haïti: "Au cours des 3 premiers mois de cette année, nous avons
consulté plus de 28 000 patients à notre clinique et je présume avec
inquiétude qu’ils seront entre 60-70 000 pour l’année. Maintenant donc, il
semble qu’ils seront plus de 120 000.
Les Prêts Gelés Sont Destinés À La Santé, L’eau Potable Et L’éducation. "Il
est malsain pour le pays le plus riche du monde de bloquer le financement de
ces projets dans l’une des nations les plus pauvres". La récente contribution
de 66 millions de dollars américains aux Organisations Non Gouvernementales
luttant contre le sida à partir du Fonds global de Lutte contre le Sida, n’a
aucune incidence sur les soins préventifs et un paquet d’assistance de la BID
destiné à la lutte contre le sida n’a jamais été fourni. La population mal
nourrie de l’île, note le Dr. Farmer, est trop vulnérable aux maladies de
toutes sortes pour que des fonds consacrés au traitement puissent entraîner
des effets profonds. Seulement à travers des investissements dans le
traitement de l’eau à la campagne, la mise en place de clinique médicale et de
systèmes d’éducation, tels que ceux que le Parti Fanmi Lavalas et le
Gouvernement haïtien ont initiés, pourront être atteints des objectifs à long
terme en matière de santé, pour les familles haïtiennes vivant de manière
prédominante dans les zones rurales.
Le Rôle Ironique Des États-Unis d’Amérique En Tant Que Facilitateur De La
Pauvreté Haïtienne.
Des sommes importantes de l’assistance bilatérale ont été refusées à Haïti en
raison du refus de la Maison Blanche et d’autres opposants au Président
Jean-Bertrand Aristide, de même que certains autres bailleurs, influencés par
les États-Unis d’Amérique. Cette attitude est due à l’hostilité implacable de
Washington envers Aristide et l’exercice du pouvoir par son Parti Fanmi
Lavalas. Les Républicains menant l’accusation contre lui, dans cette bataille
farouchement partisane, arguent que les États-Unis d’Amérique ont déjà fourni
suffisamment d’aide au pays, si jamais on peut dire qu’une quelqueconque aide
financière minimale a été accordée à Haïti. L’enveloppe de 73 millions de
dollars américains, fournie l’année dernière pour une assistance d’urgence à
de nombreux Haïtiens mourant de faim, sera réduite cette année, s’il faut en
croire les propos du secrétaire d’État Collin Powell, au cours de l’Assemblée
générale de l’OEA du mois de juin tenue à la Barbade, à un montant dérisoire
de 20 millions de dollars américains. En outre, le Centre Quixote, une
organisation haïtienne de défense, soutient que l’assistance américaine est
utilisée le plus souvent à des fins de paiement de frais de consultations à
des étrangers, sur des comptes financiers étrangers de vendeurs de services
américains ou des comptes détenus par l’infime minorité de nantis haïtiens.
Un Officiel de l’USAID en Haïti a dit récemment à des visiteurs que "79
centimes sur chaque dollar déboursé par la USAID dans le monde, sont dépensés
aux États-Unis d’Amérique", quand ces fonds sont éventuellement décaissés. Un
montant total s’élevant à 500 millions de dollars américains de prêts
internationaux et de dons a été gelé sous la dissimulation de demandes faites
par les ennemis d’Aristide exigeant qu’ils soient gelés jusqu’à ce qu’on soit
parvenu à un consensus entre l’Administration légitime axée sur la démocratie
et une vague coalition, largement discréditée de quelques factions de
l’opposition, baptisée Convergence démocratique.
Toutefois, la vraie question qui est en jeu, demeure l’état d’avancement de la
privatisation des entreprises publiques de l’île. Les institutions financières
internationales, fidèles à leurs vielles formules, ont conditionné l’octroi de
toute assistance au développement à la mise en œuvre de politique
d’ajustements structurels afin d’ouvrir sans protection l’économie haïtienne
et d’accroître l’exportation de matières premières, tel le sucre. Tandis que
la canne à sucre est cultivée dans les champs de l’île, les familles affamées
sont obligées d’acheter le " sucre Domino," transformé hors-taxe aux
États-Unis d’Amérique pour supporter la surconsommation et le retard de
l’économie haïtienne. La BID prétend qu’aucun prêt ne peut être accordé à
Haïti en raison du simple fait que le pays doit des arriérés, mais le
département d’État a fait clairement comprendre que les cordons de la bourse
ne seront déliés que lorsque son agenda aura été exécuté.
L’IRI Et La Convergence
À l’origine de cette politique impitoyable aussi bien que du gel cruel de près
de 100 millions de dollars américains de fonds supplémentaires de la BID, se
trouvent l’Institut républicain international (IRI) et ses alliés du Parlement.
Sous l’impulsion philosophique du sénateur Jesse Helms (R-NC), cette opération
de l’aile droite, financée par les fonds blanchis à travers le National
Endowment for Democracy (NED), un embargo dévastateur de l’aide occidentale a
été orchestré contre la Nation Caraïbes.
En janvier 2001, Monsieur Ira Kurzban, l’avocat de l’Administration d’Aristide
aux États-Unis d’Amérique a déclaré que l’IRI a facilité l’allocation de 3
millions de dollars américains des fonds du NED à la Convergence démocratique.
Le 2 février de l’année dernière, le Washington Post a rapporté ce qui suit:
"La Convergence a été formée en tant que groupe élargi avec l’aide de
l’Institut républicain international… elle comprend d’anciens sympathisants de
la dictature honnie de la famille Duvalier et des officiers militaires qui ont
renversé Aristide en 1991 et terrorisé la population du pays pendant 3 ans."
De même, l’ex-ministre haïtien des Affaires étrangères, Fritz Longchamp, dans
une interview datant de 1999, accordée au Conseil pour les Affaires
hémisphériques, a déclaré que la Convergence était "conseillée par
l’organisation IRI, basée à Washington et dirigée à Port-au-Prince par un
agent d’origine haïtienne, dont la famille était étroitement liée à l’ancien
homme fort des militaires, le général Raoul Cedras."
En instruisant la Convergence de maintenir l’impasse politique dans l’île,
l’IRI a réussi à manipuler les institutions financières et politiques dont la
mission consiste à protéger et à préserver les nations appauvries comme Haïti.
Cet objectif a été atteint avec l’appui accordé à la Convergence, qui, de
l’avis de plusieurs spécialistes de l’île, est responsable de sanctionner les
actes de violence répétés commis dans le pays, y compris l’instigation
probable de l’attaque du 17 décembre contre le Palais présidentiel. Cette
offensive s’est soldée par la mort de plusieurs agents loyaux, mais a été
repoussée d’une manière encore plus convaincante que ce qu’on a vu lors du
récent coup d’État au Venezuela.
Le patriotisme farouche de la population et son attachement à Aristide
affrontent cependant l’épreuve impitoyable de la faim. À moins qu’une limite
soit fixée aux Haïtiens, le processus démocratique peut être sacrifié au
profit de la politique de vielle date de Washington consistant à propulser la
Convergence et son superviseur étranger, l’IRI. En effet, l’IRI semble
accorder à la Convergence, une faction chancelante sur la scène politique du
pays, un droit de veto de facto sur l’autorité légitime et constitutionnelle
d’Aristide ainsi que sur l’avenir du pays.
Cette stratégie est conçue pour faciliter la chute d’Aristide en le privant
des ressources nécessaires dont il a besoin pour gouverner. En raison de leurs
relations de travail étroites avec Washington, les directeurs de la
Convergence sont devenus, en fait, des co-dirigeants du pays, en dépit de leur
manque criant de popularité. La Convergence a donné un autre ultimatum destiné
à proroger les négociations déjà difficiles en appelant les sénateurs Lavalas
élus aux élections qu’ils ont qualifiées de « frauduleuses », à démissionner
immédiatement. Une délégation américaine conduite par le député John Conyers
du Black Caucus (CBC de son sigle anglais), a observé toutefois les joutes de
mai 2000. il les a décrites comme "étant massivement populaires et marquées
par très peu de violences électorales . . . Le processus démocratique a donc
fonctionné exceptionnellement bien". Aristide a tenté de parvenir à un
compromis en obtenant la démission des sénateurs dont l’élection avait fait
l’objet de contestation, il y a plus d’un an de cela, mais la Convergence
refuse toujours de négocier, satisfaite du cours de sa politique d’asphyxie
économique du Président haïtien.
D’Interminables Négociations Sous La Houlette De L’OEA:
Tandis que l’OEA se prépare à effectuer sa vingtième visite en Haïti, les
analystes ne constatent aucun progrès qui peut laisser augurer un succès.
Tandis que la Convergence représente les objectifs politiques de l’IRI par
l’exacerbation de la division dans le pays, l’OEA et son faible secrétaire
général, César Gaviria, trébuchent en tant que médiateurs impartiaux qu’ils se
devaient d’être, se bornant uniquement aux desiderata des États-Unis
d’Amérique. De fait, un personnage clé de l’OEA, l’ambassadeur américain,
Roger Noriega, est un ancien membre du Bureau du sénateur Jesse Helms, donc un
vénérable et dangereux opposant à Aristide.
Comme Aristide, l’OEA s’est trouvée dans l’incapacité d’accomplir sa mission,
en raison d’un manque d’assistance internationale. La section 19 du Rapport de
la Commission interaméricaine des Droits humains, fait état d’un manque de
fonds comme étant la cause du non-fonctionnement des institutions judiciaires
inefficaces d’Haïti. Le maigre montant de 20 000 dollars d’assistance
humanitaire de l’OEA en réponse aux inondations récentes ayant frappé le pays,
est à peine suffisant pour couvrir les coûts annuels d’entretien de la
Limousine avec chauffeur du secrétaire général César Gaviria. Cette somme
insignifiante ne saurait en rien lancer le processus de la reprise.
L’Hypocrisie De La Maison Blanche Quand Il S’agit d’Haïti
Au fur et à mesure que s’accroît le désespoir de la population haïtienne, on
assiste inévitablement à un nouvel exode massif vers les États-Unis d’Amérique,
comparable à celui des années 1990. Bien que le Président Bush ait exprimé le
vœu de ne pas punir Haïti pour son inefficacité à réduire de manière effective
le commerce de la drogue, il ne fait rien pendant que les vétérans du
département d’État opposés à Aristide dictent la politique caraïbéenne. Le
manque d’expérience de Bush en ce qui touche aux affaires régionales en
absence d’un flair pour la conception de la politique latino-américaine, - ce
qui est également le cas du secrétaire d’État Collin Powell - , le laisse
entièrement indifférent quant aux complexités hémisphériques, à l’exception
des scénarios de terrorisme pour les esprits simplistes.
Au cours d’une interview qu’il a accordée le 3 juin à l’occasion de
l’Assemblée générale de l’OEA tenue à la Barbade, Collin Powell a reconnu
qu’Haïti "a besoin de l’assistance de la communauté financière internationale
et celle des institutions financières internationales ; mais il ajoute qu’il
est difficile de fournir ce type d’aide jusqu’à ce que la stabilité politique
soit instaurée". Ainsi donc, son raisonnement se trouve prisonnier d’un cercle
cartésien, parce que c’est justement son institution qui empêche l’atteinte de
cette stabilité. Ironiquement, à cette même Conférence, l’OEA a publié un
communiqué félicitant le Gouvernement haïtien pour les efforts déployés dans
les négociations dans lequel elle a laissé croire que le Président Aristide
peut espérer une reprise normale de la coopération économique".
Tandis que les États-Unis d’Amérique dépensent des sommes importantes pour
parvenir au règlement des conflits au Moyen-Orient et dans le Sous-Continent
indien, ils font des exigences irréalistes, sinon dogmatiques à Haïti, comme
si ce pays était une autre Suède ou une autre Suisse, et non pas l’épicentre
de la misère dans l’hémisphère occidental. Pendant que les États-Unis
d’Amérique durcissent toute forme de coopération avec le Gouvernement
Aristide, en raison de ce qui doit être considéré, au plus, comme des
peccadilles électorales, et non des scandales de grande envergure, ils
embrassent chaleureusement des nations comme l’Arabie Saoudite, qui ne
tiennent même pas de scrutin, mais qui commandent une sympathie dérivée du
pétrole de la part de Washington. De toute évidence, l’opportunisme économique,
plutôt qu’une idéologie irrationnelle, - comme l’illustre le cas d’Haïti -,
semble constituer le principal moteur de la politique étrangère des États-Unis
d’Amérique et pas nécessairement les normes démocratiques.
Les Demandeurs Haïtiens D’Asile Politique Sont automatiquement Détenus
Une philosophie de ‘’deux poids et deux mesures’’ caractérise tous les aspects
de la politique Nord-américaine envers Haïti. Contrairement aux privilèges
accordés à d’autres demandeurs d’asile en provenance de la Caraïbes, les noirs
Haïtiens sont interceptés en hautes mers, et s’ils arrivent à fouler le sol
américain, ils sont immédiatement rapatriés en Haïti. D’un autre côté, la
première génération d’expatriés cubains, contrôle maintenant la politique de
la Floride, aussi bien que le Bureau radical de l’aile droite au département
d’État, dirigé par l’idéologue d’extrême droite d’origine cubaine, Otto Reich,
qui a pu négocier un quota annuel de 20 000 réfugiés cubains aux États-Unis
d’Amérique, il y a de cela plusieurs années.
Le 10 mai, un bateau transportant des ressortissants haïtiens par la mer des
Caraïbes vers la Floride a fait naufrage, et trente réfugiés ont péri ou ont
été portés disparus. Malgré le danger évident d’un voyage aussi futile que
long, davantage de ressortissants de l’île suivent la voie de leurs
compatriotes décédés, dans une vaine quête d’un lieu de refuge en vue
d’échapper aux conditions économiques horribles prévalant sur l‘île. D’un
autre côté, le juge de district, Joan Lenard, a rejeté la défense présentée
par des avocats de plaignants haïtiens contre la politique d’immigration
poursuivie par l’Administration Bush vis-à-vis des Haïtiens, lorsqu’elle a
déclaré que le système judiciaire n’a rien à voir avec la conception de la
politique d’immigration. Déjà malmenés par le système judiciaire et le Pouvoir
exécutif aux États-Unis d’Amérique, les groupes de défense haïtiens des droits
du citoyen se trouvent engagés dans une course contre la montre, dans leurs
efforts visant à mettre un terme au gel américain de l’assistance financière
internationale qui suffoque une nation déjà en proie à une grande morbidité.
Si la Résolution H.C.R. 382 ne réussit pas à attirer l’attention du Congrès,
le Gouvernement américain aura, peut-être, raté sa dernière chance de corriger
les torts qu’il a causés à la nation la plus appauvrie et la plus férocement
manipulée de l’hémisphère occidental.
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Cette analyse a été préparée par Andrew Blandford, du COHA research group.